Le Grand Entretien de Michel Denisot : retrouvez Arnauld Mitre sur BSMART !
Interview
Michel : Le Grand Entretien avec Arnauld Mitre, qui est co-fondateur de Coorpacademy. Bonjour Arnauld Mitre
Arnauld : Bonjour Michel
Michel : Qu’est-ce que c’est que Coorpacademy ?
Arnauld : Coorpacademy c’est une solution d’e-learning, donc d’apprentissage par les plateformes digitales qu’on a lancé en 2013 avec deux de mes associés, avec pour ambition de rendre cet e-learning qui pouvait apparaitre un peu ennuyeux, plus gai, plus joyeux, plus enthousiasmant, plus engageant
Michel : Le e-learning c’est ?
Arnauld : Alors, e-learning c’est l’apprentissage mais au lieu d’apprendre en face à face comme à l’école, on apprends à travers une plateforme, par internet.
Michel : Qu’est-ce qui vous a donné envie de réinventer le e-learning ?
Arnauld : C’était un constat qu’on faisait dans les boites dans lesquelles on travaillait auparavant avec mes associés, c’est que ce e-learning 1.0, comme il existait auparavant pouvait être un peu ennuyeux. En fait, très souvent, quand on est dans l’entreprise, on endosse un costume de sérieux alors que la réalité c’est que parfois à titre personnel, dans d’autres activités de notre vie, on est plus joyeux, plus ludique. On s’est donc dit, comment pouvons-nous réconcilier ces deux individus qu’on est finalement en nous mêmes, c’est à dire cette personne sérieuse et cette personne joyeuse, pour donner aux gens envie d’apprendre. Parce que souvent, les gens ont envie d’apprendre mais c’est la forme parfois qui est très ennuyeuse, rébarbative et qui fait qu’on n’a pas très envie d’y aller.
Michel : Comment avez-vous créé cette plateforme ?
Arnauld : Au départ on a cherché une solution sur le marché qui aurait permis d’héberger ce qu’on voulait faire, puis on s’est rendus compte que ça n’existait pas. Ce qui finalement s’est avéré être une chance parce qu’on a dû le construire nous mêmes. Donc on est partis des points de pénibilité du point de vue de l’utilisateur final puis on a essayé de les résoudre. Les points de pénibilité quand on est en entreprise et qu’on vous demande d’apprendre des choses c’est : j’ai pas le temps, globalement on est tous débordés de boulot donc comment est-ce qu’on consacre 30min, 1 heure, 10min même, à un apprentissage ? Ça c’est le premier point. Le deuxième point, c’est ce que je viens de dire, c’est que les outils étaient un peu ennuyeux auparavant, donc comment on les rends plus sympas ? Le troisième point c’est cette idée qui est assez finalement, commune, qu’on sait déjà les choses, donc pourquoi est-ce que j’irais apprendre, alors que je crois que je sais déjà. Alors que souvent on croit évidemment qu’on sait quelque chose mais on n’en sait évidemment qu’on petit bout. Le quatrième point c’était comment est-ce que, paradoxalement, on recrée du lien entre les gens alors que souvent ils travaillent juste côte à côte et ils ont oublié parfois, qu’ils pouvaient s’entraider en se posant une question. Donc comment, à travers des plateformes, on reconnecte les gens entre eux. Voilà, c’était ces quatres choses là qu’on voulait résoudre, et on a essayé de faire de notre mieux pour y arriver.
Michel : Quelle est la particularité de votre protocole pédagogique ?
Arnauld : Justement, pour essayer de résoudre ces problèmes, on s’est dit « comment faire pour que les gens aient envie de venir ? ». Donc, tout ce qu’on a appris nous à l’école depuis qu’on est petits c’est : on va à l’école pour écouter le cours, à la maison quand on revient on fait les exercices et après on a des interrogations en classe. Nous on s’est dit qu’on allait faire l’inverse, parce que justement il y a des gens qui savent plus que d’autres sur des sujets, donc on va partir des questions, on teste les gens dès le début, s’ils ne savent pas répondre ils peuvent regarder le cours pour les aider, s’ils connaissent la réponse ils peuvent alors avancer plus vite. Ce protocole pédagogique dit « inversé » où l’on part de la question et le cours est un support de la question et pas l’inverse, qui est absolument le contraire de tout ce qu’on a toujours fait, à l’école depuis qu’on est tout petit.
Michel : Est-ce que c’est en cela que votre méthode est innovante ?
Arnauld : Je crois qu’elle est innovante, oui. Alors, on est pas les seuls à faire ça, on a essayé de prendre ce qui fait se fait de mieux dans le monde universitaire et scolaire mais oui, notre obsession c’est de se dire comment est-ce qu’on fait pour que les gens soient engagés avec les contenus ? Après, la façon de le faire n’est qu’un moyen au service de cette ambition là, qui est : comment est-ce que ça devient amusant ? Par exemple, là on a lancé il y a quelques mois un Cluedo : on fait un Cluedo en ligne, où l’on incarne le colonel Moutarde et l’on doit trouver qui a tué Mr Olive, mais pour le faire, on va aller interviewer des gens, donc les suspects, qui vont développer ce qu’on appelle les biais cognitifs c’est à dire, des biais de réthorique et d’argumentation, et il va falloir les déjouer. Donc en fait, pour résoudre cette énigme qui est un jeu, on va devoir appliquer des techniques qu’on aura apprises au travers d’autres modules auparavant qui vont nous permettre d’arriver jusqu’au bout. Donc c’est comment est-ce qu’on arrive à faire que les gens oublient qu’ils apprennent, et en fait ils apprennent, mais en faisant complètement autre chose. Mais tous les moyens sont bons pour y arriver.
Michel : À qui s’adresse ces formations ?
Arnauld : C’est principalement les collaborateurs des entreprises. Parce que c’est ça qu’on a choisit de faire, car en réalité ça pourrait s’appliquer à tout le monde, mais notre créneau c’est le B2B, ce qu’on appelle le Business to Business, donc on s’adresse aux entreprises, de toutes les tailles. Sachant que comme jusqu’à présent on était une équipe plutôt réduite on s’adressait principalement aux grandes entreprises, mais maintenant que l’on va recruter 25 personnes cette année, on va augmenter la taille de notre entreprise de 50%, on va pouvoir s’adresser aussi à des entreprises plus petites, donc de taille moyenne et des PME.
Michel : Comment se déroule ces formations ?
Arnauld : On se connecte, on a un identifiant et un mot de passe fourni par l’entreprise. On se connecte et puis là on a accès à un catalogue gigantesque de formation, puisqu’on peut héberger jusqu’à 100 000 formations sur notre plateforme. Il y aussi des recommandations personnalisées en fonction du profil des individus mais après, le catalogue est ouvert et on peut aller choisir ce qu’on souhaite faire à l’intérieur de ces 100 000.
Michel : Alors, on va voir les chiffres de votre société avec Virginie Masse et on se retrouve juste après.
Virginie : La startup Coorpacademy a été créée en 2012 par trois co-fondateurs, dont l’un est votre invité Michel.
Aujourd’hui la plateforme de Digital Learning compte 150 clients en France et en Suisse, et 3500 clients dans le monde.
Coorpacademy propose un catalogue de plus de 1900 cours co-édité par les meilleurs experts. Go1, qui a récemment racheté Coorpacademy, agrège en plus de cela les formations de 250 partenaires de contenu, ce qui donne plus de 100 000 formations disponibles.
La vision de Coorpacademy est ambitieuse, la startup souhaite atteindre 1 milliard d’apprenants dans le monde et pour cela, plus de 25 personnes vont être recrutées d’ici fin 2023 et Go1.com a annoncé récemment deux levées de fonds de 300 millions de dollars.
Michel : Votre objectif c’est d’avoir 1 milliard d’apprenants ?
Arnauld : Oui parce que ce qu’il s’est passé c’est que Coorpacademy a été racheté par une entreprise qui s’appelle Go1, qui est une entreprise australienne. Ça c’est passé fin mars de cette année, et leur ambition en effet eux, c’est d’être l’aggrégateur des aggrégateurs. Je vais expliquer un peu ce que ça veut dire, ils disent en gros « aujourd’hui, toutes les entreprises, pour couvrir l’ensemble des besoins de formation de leurs collaborateurs, font appel à plein de fournisseurs de contenus, et nous on se propose d’agréger l’ensemble des meilleurs contenus du monde et de fournir aux entreprises une seule licence par utilisateur pour se former à tous les sujets. Et donc eux, leur ambition, c’est effectivement d’atteindre 1 milliard d’utilisateurs d’ici peu, donc c’est une belle ambition, parce qu’ils disent : il y a la place aujourd’hui, sur ce marché là, qui est assez peu concentré encore – le marché de la formation en ligne – pour un très gros acteur mondial, et c’est leur ambition.
Michel : Que dois-je faire pour suivre une formation ?
Arnauld : Il faudrait passer par une société, une entreprise, comme je vous l’ai dit on fait du B2B. Vous nous appelez, alors vous évidemment Michel, on vous offrira un accès si vous êtes intéressé, mais sinon, vous nous appelez, on vous fait un devis sur la base du nombre de collaborateurs que vous souhaitez former et c’est parti.
Michel : Qui sont vos clients ?
Arnauld : Aujourd’hui, sur Coorpacademy, principalement des grands groupes. C’est Kering, Michelin, des grands groupes français principalement. Et chez Go1, eux ils sont spécialisés sur des entreprises plutôt de taille moyenne, et ils ont 3500 clients dans le monde donc, la liste serait longue.
Michel : Comment vous accompagnez vos clients ?
Arnauld : C’est très important. Surtout sur le marché du grand compte, où les clients ont besoin de beaucoup d’accompagnement. On a donc deux types d’équipes différentes. On a les équipes qui vont signer les contrats puis on a les équipes après qui accompagnent les clients tout au long du projet. C’est un point important que vous soulevez, car ce n’est pas parce qu’on pose un outil, que les utilisateurs y viennent. Il faut l’animer, c’est comme n’importe quel produit, il faut bien le lancer et bien le faire vivre tout au long de sa vie, il faut bien parfois l’accompagner derrière. C’est le rôle de ce qu’on appelle des Customer Success, donc des gens au service du succès des clients, de proposer des animations en permanence aux clients pour faire venir les utilisateurs sur la plateforme car c’est pas si facile que ça.
Michel : Quels sont les professionnels qui vous entourent et si j’ai bien compris, vous en cherchez d’autres ?
Arnauld : Oui. Évidemment on a donc des commerciaux, donc des gens qui vont chercher des clients, c’est toujours un peu quand on a une entreprise, le nerf de la guerre. On recrute aussi des développeurs, c’est un marché en tension, marché du recrutement qui est en tension, c’est pas si facile. On recrute aussi des gens, ce qu’on appelle des ingénieurs pédagogique, donc des gens qui sont chargés de designer les contenus, de les concevoir. Et on recrute du coup aussi des Customer Success, donc des gens qui s’occupent du succès des clients.
Michel : Quels sont vos objectifs à court et moyen terme ?
Arnauld : À court terme, on doit évidemment, faire notre croissance. Tout l’enjeu de Coorpacademy, c’est continuer à faire cette croissance qui est importante évidemment pour toutes les entreprises, sans renoncer à nos principes de base et le principe fondateur dont je parlais tout à l’heure qu’on a appelé en anglais « Enjoy Learning » c’est à dire, apprendre en s’amusant en fait. Un mantra qu’on a, qui veut dire on peut être sérieux sans être grave. On peut parler de choses sérieuses, sans être obligés de mettre de la gravité quand on les dit.
Michel : Pourquoi avez-vous choisi ce nom, Coorpacademy ?
Arnauld : Alors au début on a hésité en 2013, pour la petite histoire, deux des cofondateurs, donc Jean-Marc Tassetto et moi-même, on vient de Google. Alors à l’époque, les noms dans le web il y avait beaucoup deux fois la lettre o, Google, Yahoo, donc on s’était dit 2 « o » c’est bien. Et puis on voulait dire « corporate » donc on s’adresse au B2B, donc ça fait Coorp, donc on l’a écrit avec les deux « o », mais ça veut dire Coorp : corporate. Et puis Academy puisqu’on fait de la formation, donc, ça nous paraissait logique.
Michel : Merci beaucoup.
Arnauld : Merci Michel.