Quels sont les enjeux principaux autour de la data pour le 21 siècle ?
Interview
The Data Touch contribue à la réussite des entreprises en leur fournissant des résultats tangibles issus de l’exploitation de données Internet. The Data Touch propose également des formations data en entreprise pour accroitre les compétences des collaborateurs. Les produits et services offerts comprennent : la production de prototypes de machine learning visant à prédire des résultats centrés autour des objectifs de l’entreprise, la création d’une culture de la data au sein des entreprises, la mise en place d’initiatives data autour du comportement des consommateurs en ligne et des performances sur Internet en général.
The Data Touch a débuté un partenariat de co-édition de cours avec Coorpacademy. Deux cours sont d’ores et déjà disponibles sur les plateformes de formation digitale de Coorpacademy : Data, une méthodologie au service des entreprises, et L’art de la visualisation des données.
Nous avons eu la chance de poser nos questions à Penelope Bellegarde, la fondatrice de The Data Touch. L’interview est aussi disponible en anglais ici.
Pourquoi avez-vous fondé The Data Touch ?
J’ai fondé The Data Touch il y a 3 ans et demi à Londres pour relever trois défis principaux. Le premier défi est de réussir à créer de la valeur tangible issue des données Internet (ou digital data comme on dit en anglais). En effet, beaucoup (trop !) de data est collectée dans ce domaine et elle fait encore trop souvent l’objet de rapports chiffrés interminables par opposition à de la valeur réelle pour l’entreprise. Le deuxième défi est de briser les frontières qu’il existe entre les départements data et les directions d’entreprises. En effet, ces deux groupes de collaborateurs se parlent rarement et engager ce dialogue est pourtant vecteur de valeur pour l’entreprise. Lorsque les dirigeants connaîtront mieux l’art du possible avec la data ils auront envie de devenir eux aussi plus data driven ! Et lorsque les analystes comprendront mieux les objectifs de l’entreprise, leurs analyses seront d’autant plus percutantes et commenceront vraiment à influencer !
Enfin, le troisième défi à résoudre était « d’armer » les collaborateurs de l’entreprise (qui n’ont pas un profil technique) avec une culture de la data et des méthodologies efficaces et simples à mettre en place. Dans le monde digital, de plus en plus de campagnes personnalisées sont lancées et cela de plus en plus fréquemment. Les entreprises sont donc de plus en plus soucieuses de connaître le retour sur investissement de ces initiatives, ce qui se traduit par une demande croissante de résultats chiffrés. Et donc de plus en plus de personnes qui ne sont pas des analystes doivent monter en compétence dans le domaine data pour répondre à ces nouvelles attentes ! The Data Touch crée et délivre donc des programmes de formation pour les entreprises ainsi que pour les futurs cadres en École de Commerce.
Quelles sont les raisons qui vous amènent à considérer la data comme la ressource la plus convoitée du 21ème siècle ?
Un des atouts principaux de la data c’est qu’elle peut fournir des réponses objectives et permet donc de créer un consensus au sein des entreprises, mais encore faut-il que les questions qu’on lui pose soient de bonnes questions qui seront source de valeur !
La data permet aussi d’appréhender des nouvelles tendances et nouveaux phénomènes que l’on n’aurait pas soupçonné par nous mêmes… Par exemple, les techniques de Machine Learning et en particulier celles de l’apprentissage non-supervisé comme le clustering permettent d’identifier des groupes distincts (de clients etc…) que nous n’aurions pas forcément soupçonné à “l’oeil nu”.
La data permet également d’anticiper et de prévoir les comportements et donc d’apporter à l’entreprise un réel avantage concurrentiel.
Quels sont les critères qui font qu’un projet data soit un succès ? Ou, à l’inverse, un “gâchis” de temps et d’investissement ?
Comme nous l’expliquons dans le cours, il y a des éléments essentiels à garder à l’esprit si l’on veut réussir son projet data. Premièrement, commençons par nous poser une bonne question. En y répondant, serons-nous plus avancés et en mesure d’agir sur les recommandations ? Il ne faut pas hésiter à impliquer plusieurs acteurs de l’entreprise sur cette étape pour arriver à une question riche et précise à la fois. Ensuite, en fonction des questions identifiées, il faut se poser la question de savoir quelle data, parmi toutes celles qui sont disponibles seront de vrais indicateurs versus les données qui seront juste du « bruit ». Une fois l’analyse terminée, il faut la communiquer de façon efficace aux acteurs qui prendront les décisions. Il s’agit là d’un travail assez fin car il faut réussir à traduire des éléments parfois complexes en un langage simple et surtout en lien avec les objectifs de l’entreprise, sa stratégie, ses produits, ses clients…
Alors qu’il était sur toutes les lèvres, le terme de Big Data semble perdre de son importance…
Oui c’est vrai ! Il est désormais remplacé par AI: Artificial Intelligence !
Ces buzzwords sont souvent une réponse à une rapide « poussée technologique » qui prétend tout révolutionner. Mais attention, juste parce que la technologie est avancée, ne signifie pas que la révolution va porter ses fruits dès lors que l’entreprise aura investi dans ces avancées technologiques… Encore faut-il comme nous l’avons abordé lors de la question précédente se focaliser sur ce qui est important.
Pourquoi Coorpacademy ? Comment s’est déroulé le processus de création de cours avec Coorpacademy ?
Comme l’une des raisons d’être de The Data Touch est de former un maximum d’acteurs de l’entreprise sur la data, être en mesure de délivrer de la formation à un maximum d’individus en ligne à la demande est très séduisant. Lorsque j’ai été contactée par Coorpacademy pour un premier projet de collaboration, j’ai donc de suite dit oui !
Une collaboration très étroite s’en est suivie. Nous avons d’abord travaillé ensemble sur le choix des thèmes et le contenu autour de ces thèmes… Ensuite, il s’agissait de rédiger les scripts, les quizz et enfin la production des vidéos. Pour ma part, j’ai trouvé cette collaboration très efficace et agréable et ce malgré la distance géographique.
Pourquoi pensez-vous que la formation et l’apprentissage tout au long de la vie sont cruciaux pour les années à venir et pour faire face aux incertitudes du futur ?
Je pense qu’il y a de nombreux facteurs qui peuvent expliquer ce phénomène.
Tout d’abord, les avancées technologiques sont sources de nouveaux métiers, comme les data scientists par exemple. Si les concepts derrière ce métier existent depuis plusieurs décennies, il aura fallu attendre ces dernières années pour le rendre opérationnel grâce à la puissance grandissante des ordinateurs.
Un autre facteur lié à la technologie est la propagation de la data dans tous les départements de l’entreprise, y compris dans les services qui traditionnellement n’avaient jamais ou très peu recours à la data au jour le jour. Les dirigeants d’entreprise exigent donc par défaut un minimum de connaissance data de la part de chaque acteur.
D’un point de vue sociologique, je pense aussi que nous avons la chance de vivre à une époque ou écouter ses envies professionnelles devient de plus en plus la norme, alors qu’il y a encore quelques années, c’était l’exception. Maintenant les gens hésitent beaucoup moins à se reconvertir !
Enfin, on se rend aussi de plus en plus compte des limites des systèmes d’éducation traditionnels qui ont pour beaucoup toujours privilégié les compétences techniques aux compétences qui relèvent plus de l’intelligence émotionnelle. Et faire preuve d’intelligence émotionnelle est un atout qui n’a pas de prix dans le monde de l’entreprise. Les gens s’en rendent compte de plus en plus et décident donc de se former à ces techniques.
La nécessité de se former tout au long de la vie est donc un des grands bouleversements qui affecte le marché du travail depuis quelques années. Désormais, chaque individu est amené à avoir plusieurs métiers plus ou moins liés et c’est une chance formidable ! Mais cela exige évidemment des investissements réguliers dans de nouvelles formations et également de se remettre en question régulièrement.
Être capable de se former en continu est crucial car cela nous force à nous adapter, nous réinventer et donc à rester compétitif !
D’un point de vue juridico-légal, l’histoire de la data, de sa collecte et de son utilisation a été entachée de scandales, notamment au niveau du respect de la vie privée… Pensez-vous que cette prise de conscience globale est une opportunité ou une menace pour l’utilisation des datas ?
Pour ma part, d’un point de vue éthique, je pense que plus de transparence était nécessaire. Les consommateurs ont le droit de mieux comprendre quelles données les concernant sont collectées et dans quels buts. Cependant, cette collecte dans bien des cas est source de valeur pour les consommateurs et il ne faut pas l’oublier non plus. Plus une entreprise connaît vos habitudes, plus elle saura vous faire des propositions personnalisées et intelligentes et vous fera gagner du temps.
Maintenant d’un point de vue analytique, je reste optimiste quand à l’impact de la protection de la vie privée sur la collecte de données. En effet, je pense que rationaliser la data est une bonne chose. Aujourd’hui, on a accès à trop de données et on n’en fait pas grand-chose. Plus la data sera limitée, plus le domaine de l’analytique sera forcé de se poser des questions toujours plus pertinentes et aussi d’augmenter en créativité. Par exemple, si telle ou telle donnée n’est désormais plus disponible, avec quelle autre données similaire pourrons-nous la remplacer ? Etc…
Qu’est ce qui vous passionne dans le monde de la data?
Beaucoup de choses ! Mais je dois dire que la diversité des compétences requises pour réussir avec la data sont tellement diverses que ce domaine ne cesse de me fasciner et de me stimuler par conséquent !
Vu depuis l’extérieur, on a toujours tendance à ne voir que l’aspect mathématique, statistique de la data. Mais la data est aussi un art ! En effet, comme nous l’expliquons dans le cours il est absolument crucial d’être en mesure de traduire ces découvertes chiffrées en un langage simple, tangible et centré sur la valeur que ces découvertes peuvent apporter à l’entreprise… Pas facile !
Il faut aussi savoir garder l’esprit ouvert. En effet, on a souvent trop tendance à vouloir utiliser la data pour confirmer une hypothèse qui nous tient à coeur plutôt que de laisser pleinement parler la data.
Enfin, il est bien évidemment utile de connaître tout un tas d’outils utiles pour la manipulation des données et là aussi, encore faut-il se former en continu. En effet, certains outils très puissants pour la manipulation de données sont relativement jeunes. Par exemple, Pandas, une librairie fondamentale pour la manipulation de données sur Python a été créée en 2008. Google Data Studio, l’outil de visualisation des données a été lancé par Google en 2016…