C’est pas toi, c’est moi : le phénomène de la grande démission
Learning Innovation
Métro, boulot, dodo. Cette expression résume assez bien le système remis en cause par un grand nombre de travailleurs américains ces derniers mois, qui revendiquent le sentiment d’une routine professionnelle subie. C’est ce que les nouveaux actifs, ceux qui ont suivi le “big quit” remettent en question. Ils décident de démissionner d’un poste qui ne leur correspond plus, et s’en vont travailler pour des entreprises en accord avec leurs valeurs. Dès lors, comment ce phénomène s’est-il exporté en France, et quelles leçons peut-on en tirer pour l’avenir ?
The “Big quit”
Ce phénomène, c’est le “Big quit” aux États-Unis. En 2021, ils étaient plus de 38 millions d’Américains à quitter leur emploi, dont 40 % qui n’avaient pas trouvé un autre emploi quand ils ont franchi le pas. Depuis, le phénomène s’intensifie en France, mais dans des proportions moindres, mais en touchant tous les emplois et les secteurs. À titre d’exemple, une grande entreprise du CAC40 a récemment perdu 23,5% de son effectif. La DARES (Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques) indique dans une étude que « la hausse des fins de contrat à l’initiative du salarié ne concerne pas seulement les CDI. En juin 2021, les ruptures anticipées de CDD se situent 25,8 %, au-dessus du niveau atteint deux ans auparavant. ».
Avec un taux de chômage stagnant autour d’un taux de 8,1% et plus de 45% des entreprises qui ont connu des difficultés de recrutement en 2021, le phénomène se fait un chemin en France. L’économie française se portant bien même suite à la crise sanitaire, les collaborateurs n’ont pas hésité à quitter un emploi qui ne leur convenait pas, même sans nécessairement avoir un autre poste garanti. De plus, la conjoncture du marché du travail actuelle est plutôt à l’avantage des travailleurs, qui leur autorise une plus grande mobilité. À la fin de l’année 2021, la même étude de la DARES citée plus haut rapportait que 130 000 à 265 000 d’emplois n’étaient pas pourvus et 80 % des DRH interrogés faisaient état d’une pénurie de main-d’œuvre. Ces conditions ont alors encouragé les salariés, quel que soit leur secteur d’activité, à quitter leur emploi pour chercher mieux ailleurs. Néanmoins, les prochains mois seront déterminants pour notre économie, qui risque de subir par effet domino les conséquences de la guerre en Ukraine et peut-être rebattre les cartes du marché de l’emploi.
Phénomène social avant tout
2 ans auparavant, nous ne savions pas encore comment réagir face à la crise sanitaire et nous en étions encore au temps de l’adaptation. Ainsi, les actifs français ont enchaîné confinements, période de chômage partiel, télétravail, etc. Cette période instable a fait émerger de vrais questionnements sur l’absurdité du système, a fait remettre en question beaucoup de collaborateurs et sur leur réelles motivations au travail. Pour beaucoup, le confinement a été l’occasion de reprendre son souffle, ou plutôt, de respirer pour la première fois.
La crise sanitaire a rebattu les cartes dans plusieurs aspects de nos vies. Le monde du travail n’a pas été épargné : équilibre entre vie personnelle et professionnelle, recherche de sens, priorisation des besoins, etc. Pour un certain nombre de collaborateurs français, la COVID19 a servi d’accélérateur pour sauter le pas et quitter leur emploi vers un métier plus riche de sens, qui vient nourrir un vrai besoin de considération au travail.
Vers la “Big transformation”
Les attentes des collaborateurs ont radicalement changé et il faut alors s’y adapter. Faire place à la “big transformation”. En effet, si les travailleurs démissionnent, c’est aussi dû à un manque d’écoute ou de reconnaissance au travail. D’après Danny Nelms, président du Work Institute de Franklin (Tennessee), les organisations qui souhaitent retenir leurs salariés doivent « être à l’écoute » et « mettre en place des outils et des processus pour être en mesure de répondre aux besoins et aux exigences de leur personnel ». Ainsi, Danny Nelms propose des outils tels que des « entretiens de fidélisation ».
Le phénomène de grande démission, bien qu’il soit de moindre mesure en France, témoigne d’une réelle évolution des besoins et attentes des collaborateurs. Néanmoins, ce phénomène n’est pas une fatalité, si l’entreprise se transforme et met tout en œuvre pour s’adapter à ce nouveau marché du travail. Côté manager, l’écoute est donc cruciale. L’environnement de travail doit être agréable et les équipes jouent un rôle essentiel pour maintenir une ambiance de travail positive. Côté recruteurs, l’attractivité d’une offre est un point clé pour attirer les talents. Pratique du télétravail, horaires flexibles, proximité géographique et autres avantages, les leviers de motivation sont multiples. Plus que les bénéfices, ce sont aussi les valeurs de l’entreprise qui vont susciter le sentiment d’appartenance, et l’engagement des collaborateurs.
Dès lors, le learning prend tout son sens pour onboarder les nouveaux talents, fidéliser les salariés et former aux enjeux et valeurs de l’entreprise, ou encore pour créer ou renforcer une culture d’entreprise, etc. Il permet aussi aux managers d’adapter les modes de management à chaque personnalité et d’apprendre à susciter l’engagement des collaborateurs.
Il est urgent de développer des environnements de travail agréables à vivre, qui incitent les collaborateurs à s’engager sur le long terme plutôt que de démissionner. Pour cela, la formation est un outil indispensable, car il n’y a qu’en apprenant que l’on évolue.